Le diabète, aujourd’hui, en France, concerne 1 500 000 à 2 000 000 de malades dont 300 000 à 500 000 qui s’ignorent. Les prévisions de l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) pour 2020 estiment que le nombre de diabétiques, évalué actuellement dans le monde à environ 100 millions, sera doublé. Le diabète devient donc un problème de santé publique majeur, d’autant que ses complications, lorsque la prise en charge est inadaptée, sont graves et coûteuses tant sur le plan humain que sur le plan économique. 30 % des dialysés aux Etats-Unis sont diabétiques, 14 % en France. Les complications rétiniennes peuvent entraîner une cécité. En France, 5000 personnes sont amputées chaque année à cause du diabète, 220 000 en Europe. Environ 10 % des infarctus du myocarde, des pontages coronaires et des angioplasties concernent les diabétiques. Ces complications sévères auraient pourtant pu être évitées dans au moins 50 % des cas !
Le diabète se subdivise en diabète de type 1 (insulinodépendant), diabète «juvénile» dû à un déficit complet de la production d’insuline, 10 % des cas environ en France, et en diabète de type 2 (non insulinodépendant ) dû à un défaut d’efficacité de l’insuline, traité par antidiabétiques oraux (sulfamides, biguanides), mais pouvant évoluer vers l’insulino-réquérance.
L’explosion du nombre de diabétiques, prévue par l’OMS, concerne essentiellement le diabète de type 2. La gravité de la fréquence des complications du diabète est directement conséquence de l’échec fréquent du traitement du diabète de type 2. Cet échec peut être illustré par la représentation de la maladie pour les diabétiques eux-mêmes. Il s’agit, pour la plupart, d’une maladie indolore de découverte fortuite, suite à une glycosurie ( présence de sucre dans les urines) contatée à la médecine du travail ou lors d’un bilan préopératoire. Les diabétiques de type 2 ne se sentent pas malades et disent «avoir du diabète» ou seulement «avoir un peu trop de sucre» par opposition aux diabétiques de type 1 qui «sont diabétiques» . Une diabétique disait ainsi «le diabète gras, c’est seulement de passage, c’est le diabète à l’insuline qui est grave» .
Du point de vue médical, le diabète de type 2 est une maladie métabolique asymptomatique à haut risque vasculaire dont le diagnostic a été fait lors d’un bilan motivé par :
– une hérédité de 1er degré ( parents, fratrie) de diabète de type 2 ;
– une surcharge pondérale de répartition androïde ( répartition des graisses préférentiellement sur la ceinture abdominale au détriment des membres inférieurs, en particulier les cuisses), accompagnée ou non d’une hypertension artérielle, d’anomalies lipidiques ( cholestérol, triglycérides), d’une hyperuricémie…;
– un accident cardiaque ou vasculaire.
Cependant le diabète de type 2, d’apparition tardive (40-50 ans), est tellement asymptomatique, qu’il existe parfois (20 % des cas environ) déjà des complications au moment du diagnostic! Le diabète de type 1 se développe le plus souvent chez l’enfant ou l’adolescent avec toutes les difficultés de prise en charge, liées à l’âge, qui en découlent.
Le risque de complications de microangiopathie (atteinte des petites artères) est commun aux deux types de diabète (rétinopathie, néphropathie, neuropathie), il dépend de l’équilibre glycémique et de la durée du diabète. Ce risque est souvent sous-estimé par les diabétiques. Le niveau glycémique ne devient inquiétant, pour les malades, que lorsqu’il y a des symptômes, ainsi l’hyperglycémie n’alerte les patients que si elle s’accompagne de polyurodipsie (urines abondantes et soif intense) ou d’asthénie (manque de vitalité). A l’interrogatoire, 1/3 des diabétiques assimile le danger à des glycémies supérieures ou égales à 2,5 g/l. Malheureusemenet, l’hyperglycémie à 2 g/l est asymptomatique, parfois même au -delà de 3 g/l, et pourtant le risque existe dès que la moyenne glycémique est supérieure ou égale à 1,8 g/l (ce qui correspond à une hémoglobine glycosylée (HbA1C)„ 8%). Si la moyenne glycémique reflétée par le dosage régulier de l’HbA1C, est inférieure à 1,8 g/l, il n’y a pas de risque grave de microangiopathie.
Si le diabète de type 2 est asymptomatique, il en est de même pour la rétinopathie diabétique. Pendant plusieurs années, l’acuité visuelle reste normale. Lire le journal sans lunettes à 60 ans ne signifie pas qu’il n’y a pas de rétinopathie diabétique ! Les premières atteintes de la rétine par le diabète (les microanévrysmes, les microhémorragies) ne modifient pas la vision ( la rétine est l’équivalent de la pellicule d’un appareil photo). En effet, il s’agit d’altération au niveau des vaisseaux qui nourrissent la rétine, or l’acuité visuelle dépend d’une zone, la vision centrale ou macula, dépourvue de vaisseaux. Lorsque l’acuité visuelle diminue, l’évolution de la rétinopathie diabétique est déjà très avancée, la pellicule est abîmée dans son ensemble, le traitement est urgent et n’a pour but que de sauvegarder ce qui peut l’être.
La néphropathie diabétique est elle aussi silencieuse, l’apparition d’oedèmes des membres inférieurs signe une atteinte rénale grave, l’insuffisance rénale terminale conduit à la dialyse.
La neuropathie diabétique, parfois douloureuse, notamment la nuit, avec la sensation de brûlures des membres inférieurs, est le plus souvent indolore et supprime même les douleurs «normales» lors des blessures des pieds. Loin d’être un confort, l’absence d’alerte douloureuse expose à des risques de plaies graves du pied dont le point de départ est le plus souvent une paire de chaussures inadaptées. Le malade continue à marcher sur ses plaies indolores qui s’aggravent. La neuropathie supprime même parfois les douleurs d’artérite. Rétinopathie, néphropathie, neuropathie diabétique se constituent à bas bruit, lorsque la glycémie moyenne est pendant plusieurs années supérieure à 1,8 g/l. Elles peuvent être évitées si l’hémoglobine A1C reste inférieure à 8 % (moyenne glycémique < 1,8 g/l).
Les complications de macroangiopathie (atteinte des artères de gros et moyen calibre) sont plus fréquentes dans le diabète de type 2. L’artérite des membres inférieurs est le plus souvent indolore puisque fréquemment associée à la neuropathie, l’infarctus du myocarde se révèle parfois seulement par une asthénie intense et un déséquilibre du diabète, l’accident vasculaire cérébral est brutal…
Ces complications de macroangiopathie ne sont pas seulement liées à l’hyperglycémie chronique. Elles résultent de la combinaison de plusieurs facteurs de risque : hyperglycémie, dyslipidémie, hypertension artérielle, tabac, viellissement…
Pour se prendre en charge, plusieurs conditions sont nécessaires :
– Etre convaincu que l’on est malade;
– Etre convaincu que la maladie comporte des risques graves qu’il est possible d’éviter;
– Etre convaincu qu’on est soi-même capable de faire face à la maladie et que le bénéfice de la prise en charge sera supérieur au coût.
Pour se convaincre qu’on est malade malgré l’absence de symptômes, il est indispensable d’en créer un. C’est en mesurant lui-même sa glycémie capillaire une ou plusieurs fois par jour, selon les circonstances, que le diabétique peut prendre conscience de sa maladie et de sa capacité à agir sur sa glycémie.
Le diabétique devient partenaire de santé et peut tester, par exemple, l’éfficacité de sa prise en charge diététique en se piquant le bout du doigt. Il existe aujourd’hui, dans le commerce, des autopiqueurs, presque indolores, qui permettent de prélever une micro-goutte de sang. Des appareils de lecture donnent le résultat glycémique en moins d’une minute (15 à 45 secondes en moyenne). L’autoévaluation de la glycémie doit aider à mettre en place des stratégies pour s’approcher de l’objectif glycémique défini par le diabétique en collaboration avec son médecin.
Voir les règles d’or diététiques
Elles jouent un rôle primordial dans la prise en charge du diabète. Lorsqu’il s’agit du diabète de type 1, cela permet d’élargir le régime le jour du sport et de réduire les doses d’insuline. Dans le diabète de type 2, l’exercice physique permet d’économiser l’insuline (de réduire la sécrétion d’insuline par le pancréas) tout en faisant baisser la glycémie et en améliorant le bilan lipidique.
La pression artérielle diminue grâce aux sports d’endurance. Ainsi l’ensemble des facteurs de risque cardio-vasculaire diminue grâce à l’activité physique régulière. Les modalités de l’exercice physique peuvent êtres étudiées dans les unités d’éducation, elles peuvent être mises en place et évaluées par l’auto-contrôle glycémique. Cette aide, proposée aux diabétiques dans les services de diabétologie, permet d’apprendre à vivre avec le diabète et d’acquérir une compétence dans le traitement et donc de renforcer l’estime de soi.